L’Ukraine éclaboussée par un vaste scandale de corruption
Le Devoir (Montreal), 22.11.2025
La mauvaise nouvelle est qu’il y a de la corruption au plus haut niveau. Mais la bonne, c’est que les agences ukrainiennes font leur travail [pour endiguer la corruption].
« C’est manifestement mauvais pour le moral des Ukrainiens et pour celui des soldats. Ça aura certainement une influence sur le niveau de confiance accordé à Zelensky. Mais tout dépendra de sa réaction », explique Oleksiï Haran, professeur de science politique à l’Université nationale Kyiv Mohyla.
Plusieurs réclament la démission du chef de cabinet et proche allié de Zelensky, Andriï Yermak, qui tire les ficelles de la politique ukrainienne. Ils estiment qu’un détournement de fonds d’une telle ampleur n’aurait pu être orchestré sans qu’il soit au courant.
Cette demande vient non seulement de l’opposition, mais aussi de députés du parti de Zelensky, relève le professeur Haran. « Le parti de l’ex-président Porochenko exige même que tout le gouvernement soit dissous. Mais des experts politiques et des experts en matière de lutte contre la corruption estiment que ce serait une mauvaise idée puisque ça déstabiliserait le pays. »
Puisque l’Ukraine est régie par la loi martiale, aucune élection présidentielle ne s’est tenue depuis le début de la guerre, ce qui crée une concentration du pouvoir autour de Volodymyr Zelensky. Oleksiï Haran croit que la mise en place d’un gouvernement technocratique, une sorte de coalition d’unité nationale, pourrait permettre au président ukrainien de retrouver une certaine légitimité.
Quel effet a ce scandale sur l’effort de guerre ?
Depuis le début de la guerre, beaucoup de fonds ukrainiens et étrangers ont servi à renforcer le secteur énergétique du pays, pris pour cible par la Russie. Energoatom, l’organisme au cœur du scandale, gère trois centrales nucléaires générant plus de la moitié de l’électricité produite en Ukraine.
Des pots-de-vin versés étaient liés à des contrats de construction visant à protéger des centrales nucléaires. Selon The Guardian, dans une conversation enregistrée, « un suspect a déclaré qu’il était “dommage” de construire une structure pour défendre les centrales électriques contre les bombardements russes, car l’argent pourrait être volé à la place ».
Ce scandale aurait des ramifications jusqu’au ministère de la Défense. « Sous la loi martiale, les possibilités de corruption ont augmenté, fait remarquer Oleksiï Haran. On n’a pas le temps de lancer des appels d’offres publics, donc, ça crée indéniablement des possibilités de corruption. »
L’Ukraine mène deux guerres, rappelle-t-il. « Il y a une lutte sur la ligne de front et une lutte ici, contre la corruption. […] La mauvaise nouvelle est qu’il y a de la corruption au plus haut niveau. Mais la bonne, c’est que les agences ukrainiennes font leur travail [pour endiguer la corruption]. »
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